Forum-Moins :: -Arts- :: Livres
Page 3 sur 3 • Partagez
Page 3 sur 3 • 1, 2, 3 |
L’envol dans les étoiles
Re: L’envol dans les étoiles
Le don de soi-même
Je m’offre à chacun comme sa récompense ;
Je vous la donne même avant que vous l’ayez méritée.
Il y a quelque chose en moi,
Au fond de moi, au centre de moi,
Quelque chose d’infiniment aride
Comme le sommet des plus hautes montagnes ;
Quelque chose de comparable au point mort de la rétine,
Et sans écho,
Et qui pourtant voit et entend ;
Un être ayant une vie propre, et qui, cependant,
Vit toute ma vie, et écoute, impassible,
Tous les bavardages de ma conscience.
Un être fait de néant, si c’est possible,
Insensible à mes souffrances physiques,
Qui ne pleure pas quand je pleure,
Qui ne rit pas quand je ris,
Qui ne rougit pas quand je commets une action honteuse,
Et qui ne gémit pas quand mon cœur est blessé ;
Qui se tient immobile et ne donne pas de conseils,
Mais semble dire éternellement :
« Je suis là, indifférent à tout. »
C’est peut-être du vide comme est le vide,
Mais si grand que le Bien et le Mal ensemble
Ne le remplissent pas.
La haine y meurt d’asphyxie,
Et le plus grand amour n’y pénètre jamais.
Prenez donc tout de moi : le sens de ces poèmes,
Non ce qu’on lit, mais ce qui paraît au travers malgré moi :
Prenez, prenez, vous n’avez rien.
Et où que j’aille, dans l’univers entier,
Je rencontre toujours,
Hors de moi comme en moi,
L’irremplissable Vide,
L’inconquérable Rien.
Valery-Larbaud
Je m’offre à chacun comme sa récompense ;
Je vous la donne même avant que vous l’ayez méritée.
Il y a quelque chose en moi,
Au fond de moi, au centre de moi,
Quelque chose d’infiniment aride
Comme le sommet des plus hautes montagnes ;
Quelque chose de comparable au point mort de la rétine,
Et sans écho,
Et qui pourtant voit et entend ;
Un être ayant une vie propre, et qui, cependant,
Vit toute ma vie, et écoute, impassible,
Tous les bavardages de ma conscience.
Un être fait de néant, si c’est possible,
Insensible à mes souffrances physiques,
Qui ne pleure pas quand je pleure,
Qui ne rit pas quand je ris,
Qui ne rougit pas quand je commets une action honteuse,
Et qui ne gémit pas quand mon cœur est blessé ;
Qui se tient immobile et ne donne pas de conseils,
Mais semble dire éternellement :
« Je suis là, indifférent à tout. »
C’est peut-être du vide comme est le vide,
Mais si grand que le Bien et le Mal ensemble
Ne le remplissent pas.
La haine y meurt d’asphyxie,
Et le plus grand amour n’y pénètre jamais.
Prenez donc tout de moi : le sens de ces poèmes,
Non ce qu’on lit, mais ce qui paraît au travers malgré moi :
Prenez, prenez, vous n’avez rien.
Et où que j’aille, dans l’univers entier,
Je rencontre toujours,
Hors de moi comme en moi,
L’irremplissable Vide,
L’inconquérable Rien.
Valery-Larbaud
Re: L’envol dans les étoiles
Soulève ta paupière close
Qu’effleure un songe virginal ;
Je suis le spectre d’une rose
Que tu portais hier au bal.
Tu me pris encore emperlée
Des pleurs d’argent de l’arrosoir,
Et parmi la fête étoilée
Tu me promenas tout le soir.
Ô toi qui de ma mort fus cause,
Sans que tu puisses le chasser,
Toute la nuit mon spectre rose
À ton chevet viendra danser.
Mais ne crains rien, je ne réclame
Ni messe ni De Profundis ;
Ce léger parfum est mon âme,
Et j’arrive du paradis.
Mon destin fut digne d’envie :
Pour avoir un trépas si beau
Plus d’un aurait donné sa vie,
Car j’ai ta gorge pour tombeau,
Et sur l’albâtre où je repose
Un poète avec un baiser
Ecrivit : Ci-gît une rose
Que tous les rois vont jalouser.
Théophile Gautier - Le spectre de la rose - 1837
Qu’effleure un songe virginal ;
Je suis le spectre d’une rose
Que tu portais hier au bal.
Tu me pris encore emperlée
Des pleurs d’argent de l’arrosoir,
Et parmi la fête étoilée
Tu me promenas tout le soir.
Ô toi qui de ma mort fus cause,
Sans que tu puisses le chasser,
Toute la nuit mon spectre rose
À ton chevet viendra danser.
Mais ne crains rien, je ne réclame
Ni messe ni De Profundis ;
Ce léger parfum est mon âme,
Et j’arrive du paradis.
Mon destin fut digne d’envie :
Pour avoir un trépas si beau
Plus d’un aurait donné sa vie,
Car j’ai ta gorge pour tombeau,
Et sur l’albâtre où je repose
Un poète avec un baiser
Ecrivit : Ci-gît une rose
Que tous les rois vont jalouser.
Théophile Gautier - Le spectre de la rose - 1837
Re: L’envol dans les étoiles
Le papillon
Naître avec le printemps, mourir avec les roses,
Sur l’aile du zéphyr nager dans un ciel pur,
Balancé sur le sein des fleurs à peine écloses,
S’enivrer de parfums, de lumière et d’azur,
Secouant, jeune encor, la poudre de ses ailes,
S’envoler comme un souffle aux voûtes éternelles,
Voilà du papillon le destin enchanté!
Il ressemble au désir, qui jamais ne se pose,
Et sans se satisfaire, effleurant toute chose,
Retourne enfin au ciel chercher la volupté!
Lamartine- Nouvelles méditations poétiques -. (Pour toi Papillon:-))
Naître avec le printemps, mourir avec les roses,
Sur l’aile du zéphyr nager dans un ciel pur,
Balancé sur le sein des fleurs à peine écloses,
S’enivrer de parfums, de lumière et d’azur,
Secouant, jeune encor, la poudre de ses ailes,
S’envoler comme un souffle aux voûtes éternelles,
Voilà du papillon le destin enchanté!
Il ressemble au désir, qui jamais ne se pose,
Et sans se satisfaire, effleurant toute chose,
Retourne enfin au ciel chercher la volupté!
Lamartine- Nouvelles méditations poétiques -. (Pour toi Papillon:-))
Re: L’envol dans les étoiles
L’affiche rouge
Vous n'avez réclamé ni gloire ni les larmes
Ni l'orgue ni la prière aux agonisants
Onze ans déjà que cela passe vite onze ans
Vous vous étiez servis simplement de vos armes
La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans
Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes
Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants
L'affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants
Nul ne semblait vous voir Français de préférence
Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant
Mais à l'heure du couvre-feu des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE
Et les mornes matins en étaient différents
Tout avait la couleur uniforme du givre
A la fin février pour vos derniers moments
Et c'est alors que l'un de vous dit calmement
Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre
Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand
Adieu la peine et le plaisir Adieu les roses
Adieu la vie adieu la lumière et le vent
Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent
Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses
Quand tout sera fini plus tard en Erivan
Un grand soleil d'hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le coeur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline
Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant
Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient le coeur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient la France en s'abattant
Louis Aragon
Re: L’envol dans les étoiles
Les poètes
Il y a ce soir dans le ciel
Veiné d'encre et de rose Nil
Ce ciel vanné ce ciel de miel
Ce ciel d'hiver et de vinyle
Des vols de vanneaux qui le niellent
Ou si c'étaient que l'on devine
Des cigognes qui s'en reviennent
De quelles régions divines
De quelles rives diluviennes
Dans l'air bleu comme du Gershwin
Ou peut-être aussi bien des cygnes
Qui saignent dans le crépuscule
La lune blonde leur fait signe
Là-bas où les bateaux basculent
Et la première étoile cligne
Mais bah s'il y a ciel et plumes
Qu'importe l'aile alors ouverte
Qui bat le champ d'ombre où s'allument
Au velours d'une avoine verte
Les étincelles de l'enclume
Heure douce aux oiseaux légère
Heure aux amants tendre et troublante
Jour étrange où je rôde et j'erre
Comme une chanson triste et lente
Sur les lèvres d'une étrangère
Chimères canards ou mouettes
Dites-moi ces folles chandelles
Vous les voyez mieux d'où vous êtes
Au-delà de votre champ d'ailes
Sont-ce les yeux d'or des poètes
Firmament de métamorphoses
Où la raison se dépayse
La lumière se décompose
Omar Khayam Saadi Hafiz
O constellation des roses
S'il y a ciel il y a sable
Et ces yeux aux cieux qui s'éveillent
Sont-ce des chanteurs ineffables
Rimeurs de mots et de merveilles
Dans ma mémoire ineffaçables
Ciel sur le siècle et sur les armes
Au-dessus du jardin des morts
Ciel sur le saule et sur le charme
Et voici l'étoile Valmore
S'il y a ciel c'est pour les larmes
Les ténèbres sont les tambours
Des crucifixions humaines
Le poème y monte à rebours
D'Icare où la douleur le mène
Parmi les célestes labours
Il y a ciel où tu succombes
Sans nom que l’éclat de tes vers
C’est peu que passent les palombes
Et se balance un arbre vert
O Keats au-dessus de ta tombe...
Machado dort à Collioure
Trois pas suffirent hors d'Espagne
Que le ciel pour lui se fît lourd
Il s'assit dans cette campagne
Et ferma les yeux pour toujours
A toi géant triste et superbe
D’où la manne des mots émane
Poète vers des Feuilles d’herbe
Ciel ou prairie ô Walt Whitman
Vieil homme en blanc Chair faite verbe
S'il y a ciel ce n'est point d'anges
Et le chant se passe de lyre
S'il y a ciel le ciel nous venge
Et que du vin de nos délires
Le vent divin fasse vendange
Ciel inverse au fond de la mer
Il y a des langues ardentes
Péchés dansants larmes amères
Le bas de la robe de Dante
Y frôle ceux qui mal aimèrent
La souffrance enfante les songes
Comme une ruche ses abeilles
L'homme crie où son fer le ronge
Et sa plaie engendre un soleil
Plus beau que les anciens mensonges
Il est fait étoile d'Ovide
Avec les rayons de l'exil
Étoile au ciel almoravide
Où Federico trouve asile
Au-dessus de Grenade vide
Il y a grenade et grenade
Et pour un sourire éternel
S’entrouvre au printemps des manades
La blessure au cœur d’Aubanel
Egrenant les grains de l’aubade
Au-dessus des eaux et des plaines
Au-dessus des toits des collines
Un plain-chant monte à gorge pleine
Est-ce vers l’étoile Hölderlin
Est-ce vers l’étoile Verlaine
Étoile au front d’Apollinaire
Sous le bandeau noir qu’il enlève
Point une aube extraordinaire
Comme l’idée au front de Scève
En prend la forme imaginaire
Étoile de sang sur la plaine
Que veut dire ce noir manège
Tu visas Pouchkine au cœur Haine
Et s’enfuit à travers la neige
D’Anthès Baron van Heckeren
Marlowe il te faut la taverne
Non pour Faust mais pour y mourir
Entre les tueurs qui te cernent
De leurs poignards et de leurs rires
À la lueur d’une lanterne
Nerval s’y pend c’était fatal
Les feux forment là-haut des phrases
Et près de Pétrarque s’installent
Le Hussard sur les monts Caucase
Rimbaud dans ses draps d’hôpital
Et Germain Nouveau sous son porche
Qui compte les poux du ciel noir
Nassimi des pieds qu’on écorche
À la tête rejoint ce soir
Les chanteurs transformés en torches
Vienne Abovian ô Katchatour
Disparu sans laisser de traces
Veilleur de la plus haute tour
Tcharentz et toi voici la place
Que vous étoilez tour à tour
D’autres périssent pour l’honneur
La balle qui tua Dovalle
Perça ses vers et puis son cœur
Et les drames de Paris valent
Ceux de la Perse ou d’Elseneur
Étoiles poussières de flammes
En août qui tombez sur le sol
Tout le ciel cette nuit proclame
L'hécatombe des rossignols
Mais que sait l'univers du drame
II n'est pas que du sang qu'on verse
II n'est pas que du chant qu'on perd
Qu'on meure à Paris comme cri Perse
C'est vivant que l'on désespère
Et son chant le chanteur transperce
Je suis l'Archange et Lucifer
Tous les bourreaux mal nous bourrellent
Au prix en nous de cet enfer
De ce que nos mains naturelles
De notre âme s'emploient à faire
Celui qui chante se torture
Quels cris en moi quel animal
Je tue ou quelle créature
Au nom du bien au nom du mal
Seuls le savent ceux qui se turent
Je ne sais ce qui me possède
Et me pousse à dire à voix haute
Ni pour la pitié ni pour l'aide
Ni pour en avouer ses fautes
Ce qui m'habite et qui m'obsède
J'ouvre mon ventre et mon poème
Entrez dans mon antre et mon Louvre
Voici ma plaie et le Saint-Chrême
Voici mon chant que je découvre
Entrez avec moi dans moi-même
Aragon
Il y a ce soir dans le ciel
Veiné d'encre et de rose Nil
Ce ciel vanné ce ciel de miel
Ce ciel d'hiver et de vinyle
Des vols de vanneaux qui le niellent
Ou si c'étaient que l'on devine
Des cigognes qui s'en reviennent
De quelles régions divines
De quelles rives diluviennes
Dans l'air bleu comme du Gershwin
Ou peut-être aussi bien des cygnes
Qui saignent dans le crépuscule
La lune blonde leur fait signe
Là-bas où les bateaux basculent
Et la première étoile cligne
Mais bah s'il y a ciel et plumes
Qu'importe l'aile alors ouverte
Qui bat le champ d'ombre où s'allument
Au velours d'une avoine verte
Les étincelles de l'enclume
Heure douce aux oiseaux légère
Heure aux amants tendre et troublante
Jour étrange où je rôde et j'erre
Comme une chanson triste et lente
Sur les lèvres d'une étrangère
Chimères canards ou mouettes
Dites-moi ces folles chandelles
Vous les voyez mieux d'où vous êtes
Au-delà de votre champ d'ailes
Sont-ce les yeux d'or des poètes
Firmament de métamorphoses
Où la raison se dépayse
La lumière se décompose
Omar Khayam Saadi Hafiz
O constellation des roses
S'il y a ciel il y a sable
Et ces yeux aux cieux qui s'éveillent
Sont-ce des chanteurs ineffables
Rimeurs de mots et de merveilles
Dans ma mémoire ineffaçables
Ciel sur le siècle et sur les armes
Au-dessus du jardin des morts
Ciel sur le saule et sur le charme
Et voici l'étoile Valmore
S'il y a ciel c'est pour les larmes
Les ténèbres sont les tambours
Des crucifixions humaines
Le poème y monte à rebours
D'Icare où la douleur le mène
Parmi les célestes labours
Il y a ciel où tu succombes
Sans nom que l’éclat de tes vers
C’est peu que passent les palombes
Et se balance un arbre vert
O Keats au-dessus de ta tombe...
Machado dort à Collioure
Trois pas suffirent hors d'Espagne
Que le ciel pour lui se fît lourd
Il s'assit dans cette campagne
Et ferma les yeux pour toujours
A toi géant triste et superbe
D’où la manne des mots émane
Poète vers des Feuilles d’herbe
Ciel ou prairie ô Walt Whitman
Vieil homme en blanc Chair faite verbe
S'il y a ciel ce n'est point d'anges
Et le chant se passe de lyre
S'il y a ciel le ciel nous venge
Et que du vin de nos délires
Le vent divin fasse vendange
Ciel inverse au fond de la mer
Il y a des langues ardentes
Péchés dansants larmes amères
Le bas de la robe de Dante
Y frôle ceux qui mal aimèrent
La souffrance enfante les songes
Comme une ruche ses abeilles
L'homme crie où son fer le ronge
Et sa plaie engendre un soleil
Plus beau que les anciens mensonges
Il est fait étoile d'Ovide
Avec les rayons de l'exil
Étoile au ciel almoravide
Où Federico trouve asile
Au-dessus de Grenade vide
Il y a grenade et grenade
Et pour un sourire éternel
S’entrouvre au printemps des manades
La blessure au cœur d’Aubanel
Egrenant les grains de l’aubade
Au-dessus des eaux et des plaines
Au-dessus des toits des collines
Un plain-chant monte à gorge pleine
Est-ce vers l’étoile Hölderlin
Est-ce vers l’étoile Verlaine
Étoile au front d’Apollinaire
Sous le bandeau noir qu’il enlève
Point une aube extraordinaire
Comme l’idée au front de Scève
En prend la forme imaginaire
Étoile de sang sur la plaine
Que veut dire ce noir manège
Tu visas Pouchkine au cœur Haine
Et s’enfuit à travers la neige
D’Anthès Baron van Heckeren
Marlowe il te faut la taverne
Non pour Faust mais pour y mourir
Entre les tueurs qui te cernent
De leurs poignards et de leurs rires
À la lueur d’une lanterne
Nerval s’y pend c’était fatal
Les feux forment là-haut des phrases
Et près de Pétrarque s’installent
Le Hussard sur les monts Caucase
Rimbaud dans ses draps d’hôpital
Et Germain Nouveau sous son porche
Qui compte les poux du ciel noir
Nassimi des pieds qu’on écorche
À la tête rejoint ce soir
Les chanteurs transformés en torches
Vienne Abovian ô Katchatour
Disparu sans laisser de traces
Veilleur de la plus haute tour
Tcharentz et toi voici la place
Que vous étoilez tour à tour
D’autres périssent pour l’honneur
La balle qui tua Dovalle
Perça ses vers et puis son cœur
Et les drames de Paris valent
Ceux de la Perse ou d’Elseneur
Étoiles poussières de flammes
En août qui tombez sur le sol
Tout le ciel cette nuit proclame
L'hécatombe des rossignols
Mais que sait l'univers du drame
II n'est pas que du sang qu'on verse
II n'est pas que du chant qu'on perd
Qu'on meure à Paris comme cri Perse
C'est vivant que l'on désespère
Et son chant le chanteur transperce
Je suis l'Archange et Lucifer
Tous les bourreaux mal nous bourrellent
Au prix en nous de cet enfer
De ce que nos mains naturelles
De notre âme s'emploient à faire
Celui qui chante se torture
Quels cris en moi quel animal
Je tue ou quelle créature
Au nom du bien au nom du mal
Seuls le savent ceux qui se turent
Je ne sais ce qui me possède
Et me pousse à dire à voix haute
Ni pour la pitié ni pour l'aide
Ni pour en avouer ses fautes
Ce qui m'habite et qui m'obsède
J'ouvre mon ventre et mon poème
Entrez dans mon antre et mon Louvre
Voici ma plaie et le Saint-Chrême
Voici mon chant que je découvre
Entrez avec moi dans moi-même
Aragon
Re: L’envol dans les étoiles
La fontaine de sang
Il me semble parfois que mon sang coule à flots,
Ainsi qu’une fontaine aux rhythmiques sanglots.
Je l’entends bien qui coule avec un long murmure,
Mais je me tâte en vain pour trouver la blessure.
À travers la cité, comme dans un champ clos,
Il s’en va, transformant les pavés en îlots,
Désaltérant la soif de chaque créature,
Et partout colorant en rouge la nature.
J’ai demandé souvent à des vins captieux
D’endormir pour un jour la terreur qui me mine ;
Le vin rend l’œil plus clair et l’oreille plus fine !
J’ai cherché dans l’amour un sommeil oublieux ;
Mais l’amour n’est pour moi qu’un matelas d’aiguilles
Fait pour donner à boire à ces cruelles filles !
Baudelaire
Il me semble parfois que mon sang coule à flots,
Ainsi qu’une fontaine aux rhythmiques sanglots.
Je l’entends bien qui coule avec un long murmure,
Mais je me tâte en vain pour trouver la blessure.
À travers la cité, comme dans un champ clos,
Il s’en va, transformant les pavés en îlots,
Désaltérant la soif de chaque créature,
Et partout colorant en rouge la nature.
J’ai demandé souvent à des vins captieux
D’endormir pour un jour la terreur qui me mine ;
Le vin rend l’œil plus clair et l’oreille plus fine !
J’ai cherché dans l’amour un sommeil oublieux ;
Mais l’amour n’est pour moi qu’un matelas d’aiguilles
Fait pour donner à boire à ces cruelles filles !
Baudelaire
Page 3 sur 3 • 1, 2, 3 |
Forum-Moins :: -Arts- :: Livres
Page 3 sur 3
Permission de ce forum: Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum |