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Jean Echenoz :"L'occupation des sols"

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Jean Echenoz :"L'occupation des sols"  EmptyJean Echenoz :"L'occupation des sols"

Message par Invité...Sam 11 Jan 2020 - 13:56


Jean Echenoz est un romancier assez symptomatique de la fin du millénaire il y a dans ses romans l’importance de la question du temps.

L’occupation des sols est un petit bijou, c’est un texte extrêmement bref, c’est plutôt une nouvelle. C’est ce que la critique appelle minimaliste et que l’on peut en tout cas appeler économiste et elliptique. Il parle en terme d’objet et non pas de sujet. Au départ du texte on ne sait pas de quoi il sera question.

L’occupation des sols raconte le deuil, l’émotion, le refoulé, d’un jeune homme qui ne garde l’image de sa mère que sous la forme d’une image publicitaire qui recouvre la façade de l’immeuble où elle vantait un flacon de parfum.
C’est la destruction d’un immeuble, en particulier d’un mur sur lequel était représentée l’effigie d’une jeune femme. On comprend que cette jeune femme est morte et la destruction du mur correspond à la définitive mise à mort de cette jeune femme puisque toute image d’elle disparaît à jamais pour ceux qui restent, le veuf et le fils.

L’effigie de la mère est détruite au moment où le bulldozer rase l’immeuble. Cette mort n’a jamais été mise en mots et le deuil n’a jamais été fini ni par le mari ni par le fils. C’est au moment de l’occupation des sols, au moment où on abat l’immeuble, et avec l’immeuble le mur sur lequel figure l’image ultime de la mère, qu’a lieu le deuil du fils.

Ce qui est intéressant dans le début de la nouvelle c’est que dans l’énumération [« comme tout avait brûlé–la mère, les meubles et les photographies de la mère–… »] aucune distinction ne soit effectuée entre les choses et la mère elle-même. Le deuil est dit après les cendres.
Le sujet, l’affectivité, les émotions sont escamotés au profit de l’incendie et de la nécessité matérielle, de la difficulté matérielle de reconstituer quelque chose qui pourrait s’apparenter à un foyer, ou en tout cas un logement où l’on puisse convertir les pièces au gré des besoins : acheter un canapé convertible et permuter le salon en chambre.

Cet univers de permutation, de la combinaison où ce sont les choses et la fonctionnalité des choses qui prennent le pas sur les affect, sur les émotions, est tout à fait caractéristique du roman echnozien.
Le sujet, l’émotion et l’affectivité se vengent au fur et à mesure que la nouvelle avance et à mesure que le mur est détruit. La destruction de la chose permet de ressusciter le souvenir d’une souffrance et permet au fils d’opérer une sorte de catharsis par rapport à ce deuil.

On peut parler d’impassibilité car il n’y a aucun pathos, aucune émotion. Les choses sont dites en terme de choses, d’éléments matériels. 

Néanmoins c’est un texte sur le deuil et sur le retour de cette figure maternelle, et d'une douleur, et d'une perte qui n'ont jamais été dites, et qui n'ont jamais été accomplies. C'est plus riche que simplement minimaliste ou impassible.
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