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Les brèves et l'image du jour
Re: Les brèves et l'image du jour
Il ne faut surtout pas privatiser ADP
À l’occasion de la loi Pacte, le gouvernement souhaite privatiser ADP, l'entreprise qui construit aménage et exploite des plates-formes aéroportuaires en région parisienne. Après le refus du Sénat, la privatisation revient dans le texte de l’Assemblée nationale qui sera voté la semaine prochaine.
Le débat politique est classique, entre libéraux et souverainistes. Faut-il brader les « bijoux de famille » ? Est-il légitime de privatiser un monopole ? Au contraire, est-ce le rôle de l’État de gérer un aéroport ? Mais même sans opposition de principe aux privatisations, celle d’ADP est un choix porteur de risques.
Pourquoi privatiser ? Normalement, il y a l’idée que le privé gérera mieux l’entreprise que le public. Soit avec un management plus efficace et moins soumis aux syndicats, soit grâce à des synergies. Et donc, si un actionnaire privé pense pouvoir dégager de gros bénéfices, il sera prêt à payer cher pour racheter l’entreprise. Mais Aéroport de Paris n’apparaît pas particulièrement mal géré aujourd’hui.
Réinvestir les profits dans un fonds dont seuls les intérêts seront utilisés pour financer l’innovation est surprenant. En somme, l’État va vendre un actif dont le rendement oscille entre 5 et 10 % par an, pour investir dans un fonds qui rapportera 2 à 3 % annuels : c’est remplacer une Ferrari par une Lada. Et est-ce la bonne façon d’investir dans l’innovation de rupture ? Avant de saupoudrer des subventions privées, rappelons que la recherche publique française, un des coeurs de métier de l’État, crie famine.
Revenons sur les synergies verticales. Une synergie verticale, c’est quand une entreprise fusionne avec un ou plusieurs de ses sous-traitants (ici par exemple, le concessionnaire de l’aéroport et une entreprise de services, ou une entreprise de BTP). Normalement, cela permet de faire des économies : le concessionnaire et le sous-traitant collaboreront mieux en faisant partie d’un même groupe.
Cela peut aussi être bénéfique au client : quand l’entreprise et le sous-traitant sont séparés, ils ont tendance à se cannibaliser en appliquant chacun une marge élevée ; les prix sont alors trop élevés et les volumes trop bas. Alors qu’unies, elles n’auront plus intérêt à se cannibaliser. Appliquer une seule marge peut leur permettre d’augmenter les volumes et d’avoir in fine des revenus plus élevés.
Mais ici, le concessionnaire est en monopole avec un prix régulé par l’État, et ce prix dépendra de ses coûts. Donc si la partie services ou BTP du groupe augmente ses prix, la partie concession aéroportuaire pourra simplement répercuter cette hausse des coûts sur le prix final pour l’utilisateur.
Dans ce cas, la synergie verticale peut servir à siphonner les profits de la concession vers les sous-traitants. Rentable pour le concessionnaire, mais moins pour l’utilisateur. L’Autorité de la concurrence pourra toujours enquêter, mais tant que le hors-jeu n’est pas trop flagrant, on ne pourra rien prouver.
De plus, ADP, même privatisé, restera forcément dépendant des choix publics. Durant les 70 ans de la concession, il n’est pas inconcevable qu’il faille construire une nouvelle piste, un nouveau terminal. Si l’État autorise ces travaux et finalement les interdit à cause des riverains, il faudra indemniser ADP. Sur quelle base ? Les coûts engagés, ou les espérances de profits non réalisés ? Cela coûte vite très cher.
Il n’est pas inconcevable non plus dans les 70 ans à venir que le gouvernement taxe un jour le carburant des avions, ou impose une taxe carbone, ou une taxe spéciale sur les vols vers Paris pour financerle métro du Grand Paris. Dans ce cas, ADP demanderait logiquement une indemnisation pour cette baisse du trafic de voyageurs. Et même si l’impact est difficile à chiffrer, l’indemnité réclamée sera élevée.
En fait, une concession n’a de sens que si les règles du jeu restent stables pendant la durée de la concession. Si l’État doit demander régulièrement des avenants au contrat, il sera en position de faiblesse face au concessionnaire, qui pourra à chaque fois obtenir des contreparties conséquentes.
On peut mentionner l’aéroport londonien de Heathrow (privatisé) et sa troisième piste. Après des années de tergiversations et d’opposition des riverains, le parlement a validé ce projet à 14 milliards de livres, financé par l’aéroport lui-même. Même le « Financial Times » s’est interrogé sur la viabilité financière du projet, et le risque pour l’État de devoir renflouer le consortium en cas de dérapage des coûts. Et si un gouvernement futur changeait d’avis, le dédommagement du consortium pourrait être considérable.
En somme, il faut se rappeler un principe de bon sens. Si l’on veut pouvoir faire régulièrement des travaux chez soi, il vaut bien mieux être propriétaire que locataire. Car le locataire devra à chaque fois obtenir l’accord du propriétaire, et payer cet accord au prix fort, car il est en situation de faiblesse. A fortiori si le propriétaire est aussi l’entrepreneur en travaux publics à qui les travaux seront confiés.
Charles Dennery est chercheur en économie.
https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-193678-opinion-privatiser-adp-une-triple-erreur-2250782.php?xtor=EPR-130&_ope=eyJndWlkIjoiYWJvbm5lXzEwNTI5OTIifQ%253D%253D
Pour Charles Dennery, chercheur en économie, privatiser le Groupe ADP présente un triple risque : une mauvaise affaire financière pour l’État, un risque de dérapage des prix et un frein à tout choix futur de politiques publiques.
À l’occasion de la loi Pacte, le gouvernement souhaite privatiser ADP, l'entreprise qui construit aménage et exploite des plates-formes aéroportuaires en région parisienne. Après le refus du Sénat, la privatisation revient dans le texte de l’Assemblée nationale qui sera voté la semaine prochaine.
Le débat politique est classique, entre libéraux et souverainistes. Faut-il brader les « bijoux de famille » ? Est-il légitime de privatiser un monopole ? Au contraire, est-ce le rôle de l’État de gérer un aéroport ? Mais même sans opposition de principe aux privatisations, celle d’ADP est un choix porteur de risques.
Une mauvaise affaire financière
Pourquoi privatiser ? Normalement, il y a l’idée que le privé gérera mieux l’entreprise que le public. Soit avec un management plus efficace et moins soumis aux syndicats, soit grâce à des synergies. Et donc, si un actionnaire privé pense pouvoir dégager de gros bénéfices, il sera prêt à payer cher pour racheter l’entreprise. Mais Aéroport de Paris n’apparaît pas particulièrement mal géré aujourd’hui.
Réinvestir les profits dans un fonds dont seuls les intérêts seront utilisés pour financer l’innovation est surprenant. En somme, l’État va vendre un actif dont le rendement oscille entre 5 et 10 % par an, pour investir dans un fonds qui rapportera 2 à 3 % annuels : c’est remplacer une Ferrari par une Lada. Et est-ce la bonne façon d’investir dans l’innovation de rupture ? Avant de saupoudrer des subventions privées, rappelons que la recherche publique française, un des coeurs de métier de l’État, crie famine.
Un risque économique
Revenons sur les synergies verticales. Une synergie verticale, c’est quand une entreprise fusionne avec un ou plusieurs de ses sous-traitants (ici par exemple, le concessionnaire de l’aéroport et une entreprise de services, ou une entreprise de BTP). Normalement, cela permet de faire des économies : le concessionnaire et le sous-traitant collaboreront mieux en faisant partie d’un même groupe.
Cela peut aussi être bénéfique au client : quand l’entreprise et le sous-traitant sont séparés, ils ont tendance à se cannibaliser en appliquant chacun une marge élevée ; les prix sont alors trop élevés et les volumes trop bas. Alors qu’unies, elles n’auront plus intérêt à se cannibaliser. Appliquer une seule marge peut leur permettre d’augmenter les volumes et d’avoir in fine des revenus plus élevés.
Mais ici, le concessionnaire est en monopole avec un prix régulé par l’État, et ce prix dépendra de ses coûts. Donc si la partie services ou BTP du groupe augmente ses prix, la partie concession aéroportuaire pourra simplement répercuter cette hausse des coûts sur le prix final pour l’utilisateur.
Dans ce cas, la synergie verticale peut servir à siphonner les profits de la concession vers les sous-traitants. Rentable pour le concessionnaire, mais moins pour l’utilisateur. L’Autorité de la concurrence pourra toujours enquêter, mais tant que le hors-jeu n’est pas trop flagrant, on ne pourra rien prouver.
Un frein aux choix politiques
De plus, ADP, même privatisé, restera forcément dépendant des choix publics. Durant les 70 ans de la concession, il n’est pas inconcevable qu’il faille construire une nouvelle piste, un nouveau terminal. Si l’État autorise ces travaux et finalement les interdit à cause des riverains, il faudra indemniser ADP. Sur quelle base ? Les coûts engagés, ou les espérances de profits non réalisés ? Cela coûte vite très cher.
Il n’est pas inconcevable non plus dans les 70 ans à venir que le gouvernement taxe un jour le carburant des avions, ou impose une taxe carbone, ou une taxe spéciale sur les vols vers Paris pour financerle métro du Grand Paris. Dans ce cas, ADP demanderait logiquement une indemnisation pour cette baisse du trafic de voyageurs. Et même si l’impact est difficile à chiffrer, l’indemnité réclamée sera élevée.
En fait, une concession n’a de sens que si les règles du jeu restent stables pendant la durée de la concession. Si l’État doit demander régulièrement des avenants au contrat, il sera en position de faiblesse face au concessionnaire, qui pourra à chaque fois obtenir des contreparties conséquentes.
On peut mentionner l’aéroport londonien de Heathrow (privatisé) et sa troisième piste. Après des années de tergiversations et d’opposition des riverains, le parlement a validé ce projet à 14 milliards de livres, financé par l’aéroport lui-même. Même le « Financial Times » s’est interrogé sur la viabilité financière du projet, et le risque pour l’État de devoir renflouer le consortium en cas de dérapage des coûts. Et si un gouvernement futur changeait d’avis, le dédommagement du consortium pourrait être considérable.
En somme, il faut se rappeler un principe de bon sens. Si l’on veut pouvoir faire régulièrement des travaux chez soi, il vaut bien mieux être propriétaire que locataire. Car le locataire devra à chaque fois obtenir l’accord du propriétaire, et payer cet accord au prix fort, car il est en situation de faiblesse. A fortiori si le propriétaire est aussi l’entrepreneur en travaux publics à qui les travaux seront confiés.
Charles Dennery est chercheur en économie.
https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-193678-opinion-privatiser-adp-une-triple-erreur-2250782.php?xtor=EPR-130&_ope=eyJndWlkIjoiYWJvbm5lXzEwNTI5OTIifQ%253D%253D
Re: Les brèves et l'image du jour
Le violent incendie sur le #GrandeAmerica est toujours en cours. Le navire présente une inclinaison sur son côté droit qui s’aggrave au fil du temps...
Re: Les brèves et l'image du jour
Largo Winch a écrit:C'est un bateau çà ? En tous les cas il porte bien son nom !
Au large de la Bretagne... Il a coulé cet après midi. J'espère qu'il n'y aura pas de marée noire...
Le navire Grande America, en proie aux flammes depuis le 10 mars dernier, a coulé au large de la Bretagne mardi, indique la préfecture maritime de l’Atlantique. Il repose désormais à 4600 mètres de fond, le tout à 333km des côtes françaises. Parti de Hambourg le 8 mars au petit matin, le porte-conteneurs roulier italien Grande America est descendu dans le Détroit du Pas-de-Calais à destination de Casablanca samedi.
https://www.lepoint.fr/societe/en-feu-au-large-de-la-bretagne-le-porte-conteneurs-grande-america-a-coule-12-03-2019-2300209_23.php#xtor=CS2-239
http://lavdn.lavoixdunord.fr/550901/article/2019-03-12/le-grande-america-coule-apres-plusieurs-jours-d-incendie
Re: Les brèves et l'image du jour
Je suis d'accord Lisa, cette pêche "industrielle" n'a rien à voir avec nos pêcheurs "artisanaux". Mais il faut savoir d'où viennent ces usines à tuer les poissons ! Elle ne sont pas "européennes" !
Re: Les brèves et l'image du jour
il y en a , et beaucoup . de plus , même quand c'est pas européen , ça finit dans nos assiettes .
Re: Les brèves et l'image du jour
T'es un marrant caïman (si je puis m'exprimer ainsi).Largo Winch a écrit:Je suis d'accord Lisa, cette pêche "industrielle" n'a rien à voir avec nos pêcheurs "artisanaux". Mais il faut savoir d'où viennent ces usines à tuer les poissons ! Elle ne sont pas "européennes" !
A qui veux tu faire croire que toute l'Europe respecte les lois concernant la pêche et que le reste du monde ne sont que d'affreux assassins de la biodiversité???
Qui pèche les poissons que nous mettons dans nos assiettes? les Chinois, les Japonais...
Re: Les brèves et l'image du jour
Largo Winch a écrit:Je suis d'accord Lisa, cette pêche "industrielle" n'a rien à voir avec nos pêcheurs "artisanaux". Mais il faut savoir d'où viennent ces usines à tuer les poissons ! Elle ne sont pas "européennes" !
Quand on voit cette photo, on se doute bien qu'à ce train là, les espèces de poissons n'ont pas le temps de se reproduire.
D'après ce que j'avais lu, ce sont des chalutiers géants (+ de 24m de long) battant pavillon chinois ou sud-coréen qui sévissent surtout au large des côtes d'Afrique de l'Ouest.
Mais il ne faut pas se faire d'illusions, sûrement que toutes les mers du monde sont sillonnées aujourd'hui par ce genre de navires.
Cousteau doit-être bien malheureux s'il voit ça d'où il est...
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